Suspendues, accrochées, pendantes.
Elles se regardent de loin. Paraissent elles vieilles ?
Le temps les a t il usées ?
Vestiges de couleurs chatoyantes, restes de pigmentations sévères.

La peinture devient objet de sculpture, objet commun, se recroqueville au creux de la main, se chiffonne pour s’ébouriffer.
Relief et aspérités se mêlent à l’image animée.
s’immiscent et circulent en écho à la mixture dans laquelle la toile est lavée.
Tâches d’un laisser aller, d’une volonté à persister,
à s’exorciser par la force des bras, par la sueur des doigts, par l’épuisement du geste qui s’acharne à vouloir
tout supprimer :
les couleurs, les formes, les passés.
Retravailler ce que l’on a délaissé, délesté. Les couleurs s’accolent, se mélangent et se renforcent.
Des traits qui brouillent, s’emmêlent ou ressurgissent.
Peinture démarquée, souillée. Se retrouvent les restes dans le vaste bac d’eau où tout semble s’homogénéiser.
Le geste qui les a décoloré, délavé, ne semble pas ressortir, s’affirmer au-delà de la temporalité dans laquelle il a agît.
Pourtant, il représente, est facteur unique de ces peaux fatiguées pendues comme délaissées.
Elles gisent de beauté. Entre gravité et légèreté.
Papiers en cartons, petits avions, toute une déclinaison de l’objet poétique et esseulé.
A usage unique ?
Le geste. Répétitif, cadencé, crescendo d’accélération.
Frotter pour effacer, pour atténuer.
Question de rapidité : il faut que les couleurs s’épongent, et plus vite que ça s’il vous plait.
Pourtant il reste des traces, est-ce inachevé ?
Le vieux geste de la nuit des temps,
le vieux geste des vieilles femmes usées par la toile et les mains charnues par le poids. Le poids du temps et des femmes.
Laver, frotter mais aller de même s’encontrer, se réunir, se retrouver. Frotter avec violence sur les fleurs si pures, si belles,
si prêtes à être là.
Il y a aussi la violence, celle avec laquelle on s’acharne pour frotter, faire dévier, dériver les sinueux traits blancs du craquellement de la toile.
Puis la douceur des couleurs, du geste qui peut être attendri, calme et réconfortant. Un lavage qui efface peu à peu, prend son temps et étaye les mouvements de sa chorégraphie manuelle :
frottements l’un contre l’autre, l’un sur l’autre, amener les pièces de toiles à se confronter, à se déjouer.
La matière et le geste qui l’a rendue réunis, volume de la vidéo, volume qui se meut au fil de ses aspérités contrastées par l’image animée.
Image d’une mémoire, d’un oubli et d’un passé, l’eau de la représentation fondue dans celle de l’évier. Les mains baignant dans un lac de style Monet et un évier immaculé.
Toile devient double et s’efface pour devenir matériau.
La main qui creuse les aspérités, les exacerbent, les rend nomades.
La main qui s’appuie sans fin, s’alourdit et se redresse prête à repartir de plus belle.
Cette main qui ne s’arrête pas, continue son flot incessant de gestes courts et saccadés.
La main qui agit avec rapidité, mais peu d’agilité.
La main qui devient corps, le corps qui devient main, se penche tout du long dans chaque phalange, s’articule au sein de chaque plis ridés.
La main qui se maintient, se cramponne à cette parcelle de réalité, de processus, de transformation.
La main qui active cette modification, qui devient celle qui fait, qui créé, aboutit l’envie.
Références bibliographiques

Projets entamés, sans suite, recherches :







Brisure de biscuit, éclaboussures de coquilles.
Rondeur parfaite, ergonomique et ovale, se tient en équilibre instable. Se tient aussi dans le creux de la main. L’œuf. Comme si la rondeur de sa forme sortait tout aussi naturellement de la bouche, l’œuf.
Naissance. Naissance avortée, prêt à être destiné à quelque chose de plus grand. De plus violent. De final.
Coquille brisée, en deux, fissurée, en mille. Coquille émaillée, dissociée, si singulière.
Tâche comme grain de beauté, coquille se fait chair, déchirée, éclatée.

La violenter pour tenter de la relier. Coudre, repasser sur les trouées. Tenter vainement de rapiécer, de reconstruire. Essayer l’impossible, recomposer avec la fragilité la plus tangible. Jeu de funambule en perte d’équilibre. Et pourtant, s’acharner, s’obséder, continuer jusqu’à un succès, ou l’ombre infime de ce dernier. Jouer sur cet infra mince de subtilité fragile.
Puis recoudre pour se leurrer, recoudre, vouloir réparer en perçant, tambourinant et martelant sur cette fébrile surface,. Tenter de comprendre, d’en déjouer les fissures et les aspérités.
Tâtonner au fil de l’aiguille, au fil de la chair, au fil du relief trouvé par la caresse.

Le son creux au creux. Doux et réconfortant. Mat sans résonance, comme un coup bien encaissé.
Un coup sans prévention, sans retour. Ce son. Témoin anticipatif de la prochaine brèche à venir,
du prochain creux dans le creux. Faible écho de cette violence, à la fois paradoxe et complémentaire.

Se tapit au fond de ce creux une fine pellicule, se déchire et s’émiette tandis qu’au dehors rien n’est vu.
Au dehors de l’oeuf, rien n’est vu tout est attendu. Ni le futur soleil rayonnant et coulant, ni la prochaine vie potentielle. Au dehors de l’oeuf seule la couleur chair témoigne que ce n’est pas une pierre.
Seule sa forme pleine de rondeur révèle l’extra-ordinaire de ce petit caillou. Seules les coutures sur ce débris de vie montre un paradoxe et un fil temporel d’une violence tentée et d’une vaine réparation.

Danse d’une coquille et d’une aiguille ; se chevauchent, se touchent et se rencontrent, effilées et fissurées, se joutent. Le reste de ce qui fut œuf se retrouve criblé. Lentement, recomposé. Maladroitement, avec hésitations. Essai de le recouper avec d’autres matériau, de lui redonner ce qu’il était, mais pas vraiment. Rien ne sera plus comme avant. Alors il devient autre, objet d’unicité, ses particularités révélées. Pour une fois, son extérieur est valorisé, regardé, caressé des yeux ou fendu par l’air de cils passagers. L’imaginaire que créait sa plénitude se retrouve dissipé, effacé au profit de quelque chose de nouveau, de cassé, d’ébréché. Pas un canon de beauté. Juste un petit reste. Un petit reste recousu qui trône et impose sa présence avec fierté.
Ci contre : capture d'écran d'une vidéo.

https://youtu.be/CGFJtDHC4wI : vidéo projetée sur toile (projecteur sur socle, toile au mur)
https://youtu.be/W7x2ALmIpUc :vidéos de deux stops motions qui devaient être projetés, à coté ou sur des volumes d’œufs coulé en en argile (après tour et moulage de plâtre).
Repassés et ressassés. Empreinte d’un geste répété.
Traces d’un combat acharné, repoussé et délavé. Stries et creux se confrontent. Charnières engluées dans des plis marqués, lignes verticales et fatales.
Ne reste de l’eau coulée qu’un fond homogène pigmenté, ne reste de l’eau coulée que d’infimes paysages veineux. Écorce esseulée.

Petits traits fins, indicibles qui s’éparpillent sur le papier comme mille stries, mille veines arborescentes, palpitantes à nouveau, s’ouvrant aux couleurs venues les abreuver.
Elles ont fini d’être ébouriffées, ballottées, lissées puis re malmenées.Peuvent se montrer en paix avec une certaine fierté. Stries personnifiées.
S’équilibrent aux couleurs, dansent d’un pas échevelé sur un papier trop imbibé.
Se heurtent tantôt à une couture mal rafistolée. Raccommodage tanguant, offre une nouvelle plasticité au lambeau d’un papier trop déchiré. Continue sa valse sur le fin support devenu espace et volume. Dimension à plusieurs plans. Création d’un imaginaire et d’une forme concrète. Dune enfouie.

Repasser une, deux, trois fois. Même plus. En vouloir jusqu’à les apercevoir au loin, toujours dansantes, toujours valsantes. Superposées les couleurs prennent leur relais.
Recouvrir et user, pour révéler ? Essai de définition d’un geste pictural, lié à ce monde de la peinture. Qu’y a t-il dans ce geste ? Violence, acharnement et volonté de saturer d’un côté, de l’autre quête d’association des couleurs, méticulisme du trait à faire apparaître, soin de nourrir le papier convenablement. Qu’il s’imbibe et murisse, prêt à être usé. Est il question de préparer la fin ?

aquarelles-objets
herbier plâtre
fenêtres
écouter la maison
https://youtu.be/yujqYIQ-jgg
·ClubMed·
aquarelles
format environ A4, crayon, fusain et encre de chine sur papier de calligraphie chinoise.
aquarelles sur papier de soie, 50x75 cm, coutures.
Ci dessus : capture d'écran d'un stop motion, papier canson, fusain, gomme.

Ci contre : croquis au stylo bic bleu.
coquilles d’œufs, coutures.
balade de l'oranger
dessins du quotidien
Remettre en place les emmêlées

D’abord parler de la lumière, celle qui surgit puis s’efface, celle qui luit au fond de nos poches, s’épanouit sur ton sourire puis s’envole vers le ciel pour retrouver sa place. Traverse les couches de matières, de carapaces et de muqueuse, s’introduit, toujours plus rayonnante. Entre en communion avec son reflet pour repartir de plus belle, s’éclater, se disloquer vers d’autres.
C’est elle, son fil qu’il faut suivre, ce petit passage qu’elle ouvre, ces possibilités infinitésimales.
Toujours plus présente, sur mon écran ou dans la nuit, je la retrouve partout dans ma vie. C’est elle qui lie chacune de mes actions,
de mes apparitions, de mon trait qui s’éteint lorsqu’elle s’absente.
La construire, l’obliger à passer dans mes filets, la conduire. Essayer de me l’approprier.
L’orienter aussi, la diriger, en faire mienne pour l’emporter, la transporter. Sa physique autant que sa chaleur. Les autres et sa réflexion, attraper la molécule et le processus, les malaxer puis les rassembler. Refaire la lumière

Ensuite du découpage, celui plutôt magistral qui replace les montagnes, fonde les architectures et définit les limites de l’objet.
Un grand ciseau qui part et navigue, à la recherche de formes courbes entre obscurité et opacité. Contraste et recolle avec le faisceau que je suis toujours, incessamment.
Fais une halte aux volets fermés, à travers les persiennes, se faufile et repositionne l’espace, le trait réapparaît plus fugace, moins affirmé, peut être surexposé ? Il préfère s’excuser, disparaît au loin.
Le découpage et le recollage s’attèlent au plus dur : des imbrications, des contorsions, des contusions : il y en a dans tous les sens, elles ne s’arrêtent pas, se chevauchent, comme une course à la brièveté. La forme dure s’alanguit, se fluidifie. Aller au-delà des dehors.

Tout se compose dans le mouvement. La lumière, la forme, les lumières, les formes : des essais de la matérialiser, de le figer,
de pouvoir enfin le repérer. Une dissection du mouvement, un décorticage comme l’opération d’un dénoyautage d’olive noire.
Il faut l’attraper, toujours cette course à la brièveté. Pour l’atteindre peut être doit il le vouloir.
Le numérique, un essai raté de le fossiliser ? Une chasse au fugace, à la contemplation de ce qui est dans la constante évolution,
ce à quoi l’on ne peut déroger. Apprendre à regarder, à écouter.


Se tourner vers l’autre. Essayer de faire avec la personne, de produire ce mélange de canaux, de réseaux qui ne cessent de s’amplifier. Leur donner une.des formes : Les exporter à autre chose, leur donner la distance dont elles ont besoin. Toujours y puiser,
s’y ressourcer pour recréer. L’autre en tant que multiplicité, infinité cosmique. Le soi comme un acosmisme : l’éviter, passer au dessus, tenter de s’en défaire pour mieux comprendre l’ailleurs, la cosmologie d’une multitude en déplacement. Les affects démultipliés :
les recentrer et les faire fusionner, séparés de leur source mais liés à une autre. L’affect est intimement lié à l’autre. Il s’y déploie et permet cette immensité qu’offre le regard posé vers une autre direction que le soi. Il s’immisce et s’agrandit dans les cavités non obstruées. Apprend à prendre forme et place, il navigue au gré des intensités, fusionne l’extérieur et l’intérieur, le cosmique et la rationalité.

Rendre l’affect universel. Pouvoir partager une partie de cette chaleur confortable à ceux que l’on ne connaîtra pas, qui ne nous regarderont pas, ou que nous croiserons. Habiter cette sensibilité, être vulnérable face à autrui.
Comment faire pour partager une promiscuité sans être amené à s’ouvrir, se mettre au dépourvu ?
Face à l’autre, comment affirmer son travail sans envahir l’espace de l’autre ?
Peut être une constante remise fluctuante de cette ligne d’équilibre, incessant va et vient marin, se découpe et plonge, ravive la surface. Danseuse, elle jongle entre les remous de l’Histoire, sa condition à elle et les siphons d’une altérité perdue dans l’immensité.
Savoir twister, esquiver les attaques de gouttelettes glacées et s’enivrer du vent qui claque le visage sans précaution.
Apprendre à montrer ce qui est beau tout en se protégeant : la danse infernale de la danseuse des eaux tempétueuses.
Un remous de lignes qui n’en finissent plus, se confondent et s’assemblent pour se distordre et dérailler. S’étiolent et se diluent, elles disparaissent pour former masse, tache puis s’exorcisent en différents rayons lumineux, stricts et stridents.

Rappeler à ceux qui veulent se réparer. Épousseter, caresser, enjoliver. Processus long, sans raccourci ; prendre le temps. Décortiquer pour recomposer. Reconstruire, construire. Réparer c’est aussi avancer, c’est se lancer. Apprendre à re toucher, à re goûter.
Tâtonner dans l’obscurité épaisse, à la fois douce et mûre : offre un petit nid douillet.
Re parer : se regarder, se saisir des yeux et de la bouche, les faire valser le long du corps, collé l’un contre l’autre, s’ajustant sur les différentes mesures et courbures. Re apprendre à s’aimer.
Le regard glisse et s’éclabousse, il nie le corps courbé. Alors il faut passer par les mains : façonner ce qui ne l’a jamais été. Pétrir son ventre pour savourer la chair moelleuse, pétrir ses cuisses, ses bras, sa nuque. Pétrir pour cajoler.
Re conforter : commencer surement par la douce caresse des nuages sur le ciel, essayer de l’imiter. Frotter fort ce qui doit s’écouler, frotter jusqu’à perdre pied. Gommer les restes des larmes et se lover au creux de ces soleils qui ne faiblissent pas,
regardant toujours au loin. Partir du bout des doigts jusqu’à la pointe des cheveux. Tracer les lignes qui nous façonnent, s’élargir à celles qui nous constituent. Les lignes tournoient se rejoignent et s’éloignent, traçant une circularité qui ne cesse de s’accélérer, grandir.
L’oeuf c’est le ventre, l’épicentre des sensations.
et les liens youtube: n'hésitez pas à cliquer !
Ci contre à droite, quelques détails de coutures d'aquarelles.
aquarelles sur papier de soie, coutures, environ 50x75 cm.